Résumé sur les dernières évidences scientifiques sur l’ostéonécrose des mâchoires

Chers collègues,

Nous tenions à vous informer de certains changements quant à la procédure de référence que nous privilégions pour les patients sous traitement avec agents anti-résorptifs (i.e. biphosphonates, Denosumab, Romosozumab). Comme nous recevons un volume très élevé de demandes, nous espérons que ces changements contribueront à améliorer les délais à l’intérieur desquels nous pourrons recevoir vos patients en consultation.

Résumé des dernières évidences scientifiques sur l’ostéonécrose des mâchoires (ONM)

  • Agents disponibles
    • Biphosphonates
      MoléculeVoie d’administration
      Alendronate (Fosamax)Per os
      Risedronate (Actonel)Per os
      Acide zolédronique (Reclast ou Aclasta)Intraveineuse
      Ibandronate (Boniva)Intraveineuse
    • Inhibiteurs RANK-L (voie d’administration sous-cutanée)
      • Denosumab
        • En oncologie : XGeva
        • Dans le traitement de l’ostéoporose : Prolia
    • Romosozumab (Evenity)
  • Risque de développer une ostéonécrose des mâchoires
    Clientèle oncologiqueClientèle « ostéoporose »
    Acide zolédronique : jusqu’à 18%Biphosphonates : 0,02 à 0,05 %
    Denosumab : jusqu’à 6,9 %Denosumab : 0,3 %
    Romosozumab : 0,03 à 0,05%

    Risque de développer une ostéonécrose des mâchoires pour les patients sous traitement avec agents anti-résorptifs, selon l’indication de traitement et l’agent employé. (Ruggiero et coll., 2022)

  • Comorbidités augmentant le risque de développer une ONM chez les patients sous anti-résorptifs :
    • Prise de corticostéroïdes systémiques (excluant les corticostéroïdes inhalés)
    • Diabète, particulièrement si le contrôle en est sous-optimal
    • Anémie avec hémoglobine inférieure à 100 mg/L
    • Tabagisme actif
    • Immunosuppression, notamment secondaire à la chimiothérapie
  • Recommandations générales en péri-opératoire d’une chirurgie dento-alvéolaire chez la clientèle à risque d’ONM
    • Évaluation des facteurs de risques systémiques propres au patient
    • Prévention des infections post-opératoires
      • Retour à une hygiène buccale rigoureuse en post-opératoire
      • Prescription d’un rince-bouche à base de Chlorhexidine
      • Prescription d’une prophylaxie antibiotique selon le jugement clinique
    • Selon les cas, communiquer avec le médecin traitant pour discuter de la possibilité d’optimiser le traitement du patient d’un point de vue médical
      • Amélioration du contrôle du diabète si possible
      • Suspension ou modification du dosage de certains immunosuppresseurs si possible

Protocole de référence pour la clientèle « ostéoporose »

Pour cette clientèle, le risque de développer une ONM serait inférieur à 0,1% pour les patients sous biphosphonates. Chez les patients sous Dénosumab il serait de 0,3% ou moins. Il demeure essentiel d’évaluer les comorbidités et facteurs de risques propres au patient et de discuter des bénéfices et complications possibles avec ce dernier.

Nous vous encourageons par la suite à évaluer l’indication de référer à un chirurgien buccal et maxillo-facial comme vous le faites habituellement. Ainsi, si vous estimez être en mesure de réaliser la chirurgie indiquée et d’adapter le contexte de soins à la condition médicale du patient, une référence à notre clinique n’est pas nécessaire. Par exemple, les extractions simples ou chirurgicales que vous avez l’habitude de réaliser chez la population générale peuvent être faites chez la clientèle sous anti-résorptifs prescrits pour le traitement de l’ostéoporose.

Durée d’action des anticorps monoclonaux

Chez la clientèle sous Dénosumab pour le traitement d’une ostéoporose (Prolia), le meilleur moment pour réaliser des chirurgies osseuses serait 6 mois après la dernière injection du médicament, soit juste avant que la prochaine injection ne soit donnée.

Il est généralement très simple de communiquer avec la pharmacie traitante du patient afin de suspendre la prochaine injection jusqu’à complétion de la chirurgie et d’aviser le pharmacien que le traitement peut être repris lorsque la guérison est satisfaisante et objectivée par un suivi. Chez certains patients atteints d’ostéoporose fracturaire sévère, il est plus prudent de communiquer avec le médecin prescripteur d’abord.

Suivis postopératoires recommandés

Nous vous suggérons toutefois un suivi clinique systématique de la guérison chez ces patients, par exemple à 3 ou 4 semaines post-opératoires. Un suivi serait également idéal à 8 semaines post-opératoires.

Si une ostéonécrose des mâchoires survenait des suites d’une chirurgie, n’hésitez alors pas à nous faire parvenir une demande de consultation.

Protocole de référence pour la clientèle oncologique :

Le risque de développer une ostéonécrose des mâchoires est plus élevé chez les patients recevant des biphosphonates intra-veineux ou du Denosumab à doses oncologiques.

Reconnaître les patients sous anti-résorptifs à doses oncologiques

Chez certains patients, les antirésorptifs, souvent administrés par voie intraveineuse ou sous- cutanée, n’apparaissent pas au profil pharmacologique fourni par les pharmacies. Vérifiez donc les profils pharmacologiques disponibles au Dossier Santé Québec (DSQ).

Voici des exemples de conditions pour lesquelles les patients sont susceptibles de recevoir des antirésorptifs à dose oncologique :

  • Myélome multiple
  • Néoplasie avec métastases osseuses (les plus fréquents sont le cancer du sein, de la prostate, du poumon, du rein, de la thyroïde, du côlon)

Évaluer les risques et les bénéfices d’une chirurgie osseuse

Les risques et bénéfices d’une extraction ou d’une chirurgie impliquant les tissus durs doivent être soigneusement étudiés et discutés avec ces patients en mettant en lumière le concept de l’ostéonécrose et ses complications potentielles.

Chez cette clientèle, nous vous encourageons à privilégier les traitements peu invasifs ou non chirurgicaux lorsque possibles afin d’éviter les chirurgies osseuses. Les traitements endodontiques, les coronectomies suivies de traitement endodontique des racines et les traitements peu invasifs en parodontie sont à préconiser chez cette clientèle.

Une prise de contact avec le médecin traitant pourrait également être requise.

Référence en chirurgie maxillo-faciale chez cette clientèle

Si vous déterminez qu’une chirurgie osseuse est indiquée et que l’intervention d’un chirurgien buccal et maxillo-facial est requise sur la base de la difficulté chirurgicale ou d’un aspect lié à condition médicale du patient, n’hésitez pas à nous faire parvenir une demande de consultation.

Si vous déterminez qu’une chirurgie est indiquée et que l’intervention d’un chirurgien buccal et maxillo-facial n’est pas requise, nous vous suggérons de réaliser un suivi clinique systématique de la guérison chez ces patients à 4 puis à 8 semaines post-opératoire. Si une ostéonécrose des mâchoires survenait des suites d’une chirurgie, n’hésitez alors pas à nous faire parvenir une demande de consultation.

Merci de votre précieuse collaboration. N’hésitez pas à communiquer avec notre équipe pour plus de précisions.

Références:
Ruggiero, S. L., Dodson, T. B., Aghaloo, T., Carlson, E. R., Ward, B. B., & Kademani, D. (2022). American Association of Oral and Maxillofacial Surgeons’ Position Paper on Medication-Related Osteonecrosis of the Jaws—2022 update. Journal of Oral and Maxillofacial Surgery, 80(5), 920– 943. https://doi.org/10.1016/j.joms.2022.02.008

 

Dr Max Miller DMD FRCD (C)

Chirurgien buccal maxillo-facial

Dr Olivier Handfield, D.M.D., MSc, FRCD (C)

Chirurgien buccal maxillo-facial

Dre Annie Quesnel, D.M.D., MSc, FRCD (C)

Chirurgienne buccale et maxillo-faciale

Dre Émilie Archambault, MD, D.M.D., MSc, FRCD (C)

Chirurgienne buccale et maxillo-faciale